(1) Car la joie de vivre (2) viendra j'espère dans quelques temps.
Il faut bien vivre vaille que vivre. C'est ça que tu dis Mme Barbara, toi l'égérie de ma mère, toi qui a clamé dans mes oreilles d'enfant tes chansons souvent tristes, mais si émotionnelles... J'avais 6 ans, le mercredi, "maman Maryse" mettait le radiocassette en marche et tu partais dans la palette des sentiments. Comment je n'ai pas su écrire avant sur toi Barbara? Toutes les personnes que j'aime t'aiment. Ma mère, Patricia, et dans Patricia je retrouve beaucoup de ma mère. Ma tante aussi.
Oui, alors j'avais 6 ans et maman commençait à passer le swifer dans le salon, moi je brassais de l'air comme toujours, mais tu distillais ta vision des sentiments de ta voix perchée, avec tes notes de piano, qui résonnent juqu'au fond de ma mémoire.
Tu chantais toutes ces chansons que je sais comme l'oiseau sait fredonner son chant quotidien.
Je ne suis pas triste, pas ce soir, je suis en phase avec ma famille... Ma famille écartelée dans l'Histoire. Ma famille au creux d'une guerre.
Je ne pouvais être qu'une tranchée, puisque de part et d'autre deux blocs s'opposaient.
Je suis germanique, je suis française, je suis juive, je suis catholique. Je suis un peuple en cendres, je suis un peuple en croix.
Je suis l'enfant de la discorde.
Je suis moitié bohême par ma mère, moitié tragédie par mon père.
Je suis vous deux, et je vous aime, vous qui vous aimez malgré tout ce que vous paraisssez.
Vous avez fait de moi l'enfant brune aux bouclettes et aux yeux chapottés que je suis à 30 ans : vous avez fait de moi une personne sensible et sensée. Vous m'avez injecté l'effort et l'espérance. Je porte en moi des fours, des rails, des kapos, des rires, des paysages, des apprentissages, des baisers et de la survie.
Je porte en moi Semprun, Kertesz, Edith Stein, Moulin et tant d'autres anonymes...
Je suis une grand-mère autrichienne, une grand-mère française, je suis tout ça. Je suis la combinaison de nationalités, de destins, de fractures, mon inconscient collectif est fait de feu, de guerre, de sang et d'amour.
Je suis tout ce que ma famille a fait de moi.
Je suis heureuse, j'ai été un enfant choyé et heureux, j'ai été une adolescente en construction, une étudiante en devenir, je suis la somme de tas de destins, je devais bien un jour vous remercier....
Anna, ma grand-mère Fleury, Jean, Albert....
Toi, ma petite grand-mère "quatre-quart" ( ma Madeleine de Proust), je t'aime.
Maryline, Edgar
Mes cousins autrichiens, français, juifs.

C'est aussi ça la joie de vivre. Une immense Auberge espagnole passéiste. Vous qui me lisez, ne me lisez pas pour lire un blog. Lisez une personnalité. J'écris pour m'inscrire "le temps qui m'est imparti"...
Désolée si ce n'est pas léger (encore une fois), mais vous qui me connaissez, savez que je le suis... à la fois entière et légére/ juive et catholique/indifférente et passionnée.